dimanche, avril 28

Comment se protéger de sa mère ?

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Manœuvrer pour que les enfants sautent dans le bain, c’est bien. Mais les rabaisser, les mépriser, les culpabiliser ? Mais c’est ce que font les parents manipulateurs. Et les conséquences sont désastreuses.

Nous avons tous rencontré un manipulateur sur notre chemin auparavant — 2 à 3 % des gens le sont. Une personne toxique qui nous fait sentir piéger. Mais que se passe-t-il lorsqu’il s’agit d’un de nos propres parents ?

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La psychothérapeute française Isabelle Nazare-Aga a étudié le phénomène et donne ses conclusions. À partir de dizaines de témoignages, elle décrit les comportements de ces égocentriques qui empoisonnent la vie de leur progéniture. Pour leurs enfants, il n’y a ni « avant » ni « après » : la relation avec le manipulateur fait partie intégrante de leur identité. Ils grandissent avec un déficit émotionnel et beaucoup de culpabilité. Pour s’en sortir, la meilleure solution est souvent d’arrêter de sortir avec leur père ou leur mère.

Vous connaissez les manipulateurs en général et les amoureux, mais pourquoi tourner votre attention vers les parents ?

Tous partagent les mêmes caractéristiques, qu’ils soient parents ou non. Mais grandir avec l’un d’eux — parfois deux — est différent d’en avoir un comme conjoint, ami ou collègue.

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Le parent manipulateur est un narcissique qui a besoin de se sentir supérieur à ses enfants. Pour y parvenir, cela les dénigre et nuit au renforcement de leur estime de soi. Il se met en situation de compétition avec eux et voit leurs succès comme une menace. Ses victimes grandissent en se sentant coupables et dévalorisées et n’ont aucune confiance en elles.

Souvent, les plus introvertis achèteront la paix en évitant la confrontation. Ils courent le risque de devenir taciturnes, anxieux et déprimés. Les extravertis se rebelleront davantage. Certains quitteront leur foyer et atteindront leur autonomie très jeune, car dès l’âge de 15 ou 16 ans. Mais s’ils n’ont pas de plan, ils finiront dans la rue.

Concrètement, comment se comporte le parent manipulateur ?

C’est un spécialiste de l’expression meurtre. Une femme m’a raconté que sa mère lui avait dit : « N’ayez qu’une fille comme vous », alors qu’elle était devenue médecin !

Dans ces familles, les fêtes et les réunions sont tendues. Même si tout le monde marche sur des coquilles d’œufs, le manipulateur trouve une raison d’avoir une crise et de ramener l’attention sur lui-même. Aussi, il réagit mal aux bonnes nouvelles. Si son fils obtient un diplôme, il s’exclame : « Il est temps », au lieu de le féliciter. S’il a plus d’un enfant, il les traite injustement. Il se confie et accorde des privilèges à l’un et non à l’autre, ce qui crée des tensions chez les frères et sœurs.

Le parent manipulateur est souvent avare, même s’il parle beaucoup d’argent. Lorsqu’il offre des cadeaux, ils ne conviennent pas à l’âge ou aux intérêts de son enfant, même un adulte. Sa contribution financière est toujours conditionnelle. Par exemple, il accepte de payer les études de son enfant uniquement s’il continue à vivre chez lui.

Vous allez jusqu’à dire que son amour est conditionnel…

C’est difficile, mais c’est vrai. Un tel parent n’aime sa progéniture que s’il lui est soumis, lui fait sentir indispensable et prouve son amour pour lui.

L’individualisme dominant exacerbe-t-il ces attitudes ?

Non. De plus, les manipulateurs se retrouvent dans des sociétés plus centrées sur la communauté, comme le Japon. Ce n’est ni le reflet de valeurs sociales ni un trait de caractère, c’est une maladie psychiatrique. Cette nuance est cruciale pour une victime. Une fois qu’elle a compris cela, elle peut cesser de se sentir coupable : elle n’est pas la cause de comportements malsains et elle ne peut pas espérer de changement.

Y a-t-il plus de pères ou de mères manipulateurs ?

Nous les trouvons dans des proportions à peu près égales. De l’autre Par la main, j’ai reçu cinq fois plus de témoignages de mères que de pères. À mon avis, cette façon d’agir est plus offensante pour la mère. L’idée qu’une mère traite ses enfants de cette façon est difficile à avaler.

Les pères et les mères manipulent de la même façon, à quelques différences près. Par exemple, une mère utilise davantage la maladie, l’obésité ou le handicap pour éveiller sa culpabilité et attirer l’attention. Si son enfant lui donne les clés de son domicile (quoi ne pas faire !) , toutes les raisons sont bonnes pour y entrer sans prévenir : laver les rideaux, récupérer un objet oublié. Le père, en revanche, est souvent un tyran de l’éducation. Il traite son enfant de « crétin » ou de « crétin » s’il est incapable de terminer un devoir de mathématiques, par exemple.

Devons-nous les affronter ?

Surtout pas ! L’enfant qui reconnaît la maladie chez son parent a un avantage : il gagne en perspective. Grâce à ce détachement, si son père ou sa mère lui lance une phrase (« Tu es nul, tu n’as jamais rien fait de bien dans la vie »), il peut lui répondre (« C’est ton avis ») ou se rassurer intérieurement (« Je t’ai reconnu, tu ne m’auras plus »). Il peut aussi se permettre d’espacer les rencontres avec ce parent ou de couper complètement les liens.

Est-ce la meilleure solution ?

Cela dépend. Certains parviennent à minimiser les dégâts en ne voyant leur parent que quelques fois par an et jamais seul, par exemple. Si cela est impossible et que le parent est très destructeur, couper les ponts est une solution. Oui, le parent sera choqué et l’enfant vivra de culpabilité. Mais il le ressent déjà. Tu pourrais aussi bien sauver ta peau.

Les enfants de parents manipulateurs sont-ils susceptibles de reproduire ces comportements à leur tour ?

Non. Le parent était manipulateur avant de devenir parent. Ce n’est pas la fonction qui l’a fait. Au contraire, les personnes qui ont grandi dans ces circonstances montrent une beaucoup d’empathie avec leurs propres enfants.

Reconnaître un parent manipulateur

Pour être considéré comme manipulateur, un parent doit posséder au moins 14 des 30 caractéristiques définies par Isabelle Nazare-Aga. Voici certains d’entre eux :

  • Il culpabilise les autres au nom du lien familial ;
  • Il s’interroge sur les qualités, la compétence, la personnalité des autres : il critique sans y ressembler, dévalorise et juge ;
  • Il est jaloux ;
  • Il ment ;
  • Il se fait passer pour une victime afin que l’on puisse se plaindre de lui ;
  • Il sème la discorde et suscite la suspicion, divise pour mieux régner et peut provoquer la rupture d’un couple ;
  • Il est égocentrique ;
  • Il recourt à des menaces déguisées ou à un chantage ouvert ;
  • Il ne supporte pas les critiques et nie l’évidence ;
  • Cela donne à l’autre personne un état de malaise ou le sentiment d’être prise au piège ;
  • Cela oblige les autres à faire des choses qu’ils n’auraient pas faites de leur propre chef volonté ;
  • Il est constamment discuté, même en son absence.