Alzheimer, Parkinson : comment le “manger-mains” lutte contre la dénutrition et stimule l’appétit

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En EHPAD, plus d’un tiers des résidents atteints de maladies neurodégénératives présentent des troubles de la déglutition ou de la préhension, selon les dernières données de la Haute Autorité de Santé. Malgré l’accompagnement soignant, la perte d’autonomie alimentaire reste un défi quotidien qui favorise la dénutrition.

Certains établissements constatent pourtant une amélioration de l’apport nutritionnel et du plaisir de manger grâce à une modification simple de la présentation des repas. Ce dispositif, adopté dans plusieurs structures, s’appuie sur des solutions concrètes pour préserver l’autonomie à table et relancer l’appétit, même en cas de troubles cognitifs avancés.

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Perte d’autonomie et dénutrition : un défi quotidien en EHPAD

En établissement, la dénutrition ronge les rangs sans bruit ni pause. Les chiffres sont sans appel : près d’une personne âgée sur deux, quatre patients Alzheimer sur dix, subissent la fonte du poids et des forces. Les troubles cognitifs et moteurs, gestes hésitants, maladresses, difficulté à saisir les couverts, entravent la prise alimentaire jusqu’à l’épuisement. À la table, la perte d’autonomie accélère la spirale : moins on mange, plus le corps se fragilise, moins on a la force de se nourrir.

Jour après jour, le personnel observe les mêmes signaux d’alerte : refus des assiettes, appétit effacé, fatigue pesante, retrait. Les aidants et les familles, désarmés, assistent à cette glissade sans toujours trouver la parade. Un climat d’infantilisation s’installe, douloureux pour tous. Pourtant, de nouvelles pratiques apparaissent et redonnent souffle à la table en établissement.

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La démarche manger-mains gagne du terrain, portée par des équipes convaincues : manger avec les doigts n’est pas un retour en arrière, mais un chemin retrouvé vers l’autonomie. Cette méthode, validée par des diététiciens, s’adresse tout particulièrement aux personnes touchées par Alzheimer ou Parkinson. Elle replace le plaisir, la dignité et la liberté au cœur du repas, sans jamais sacrifier les besoins nutritionnels ou le respect du rythme de chacun.

Le Collectif de lutte contre la dénutrition, France Alzheimer en tête, épaulé par d’autres associations, exhorte à repenser l’accompagnement autour de l’alimentation. Préserver la dignité à table, renforcer la santé, retisser le lien social : le manger-mains fait bouger les lignes pour les résidents, leurs proches et les soignants engagés à leurs côtés.

Le manger-mains, une approche qui redonne envie de manger

Le repas change de visage : la méthode manger-mains, impulsée par le Pr Charles Henri Rapin, bouleverse la routine des personnes atteintes de maladies neurodégénératives. Grâce à des aliments transformés en bouchées faciles à saisir, le repas redevient accessible et vivant, même lorsque la préhension faiblit. Oubliez les couverts : chaque geste retrouve sa simplicité, chaque bouchée devient une petite victoire sur la dépendance.

Tout se joue sur les détails : menus adaptés, textures revisitées, présentation soignée. Cuisiniers, soignants et diététiciens conjuguent leurs savoir-faire pour offrir saveur, variété et équilibre. Manger avec les mains, c’est retrouver le choix, le contact, la curiosité. Cette liberté redonne confiance, stimule l’envie d’échanger, transforme la table en lieu de partage et non d’assistance.

Rien n’est laissé au hasard dans la mise en place du manger-mains. Les bouchées, concoctées sur mesure, s’ajustent aux capacités de mastication, aux goûts et aux habitudes de chacun. Cette flexibilité préserve l’estime de soi, tout en apaisant certains troubles du comportement fréquents avec Alzheimer ou Parkinson.

À chaque bouchée, le résident retrouve un peu de son autonomie, le plaisir du goût, la fierté de se nourrir seul. Le manger-mains s’affirme comme une solution concrète et humaine contre la dénutrition en EHPAD, réaffirmant que le repas, même adapté, peut rester un moment de vie et de dignité.

alimentation thérapeutique

Conseils pratiques pour stimuler l’appétit et préserver l’autonomie à table

Pour faire du repas un allié de la santé, plusieurs gestes simples peuvent être adoptés dès la préparation. Voici ce qui fait la différence au quotidien :

  • Miser sur des bouchées colorées et variées, faciles à attraper, qui éveillent la curiosité et l’envie de goûter, surtout pour les personnes touchées par Alzheimer ou Parkinson.
  • Travailler les textures : privilégier mousses, purées fermes ou bouchées moelleuses pour faciliter la mastication et la déglutition.
  • Intégrer des aliments riches en protéines, œufs, poissons, viandes, afin de limiter la perte musculaire, un enjeu majeur face à la dénutrition.

À l’heure du repas, le choix du matériel change la donne. Quelques équipements adaptés rendent la prise alimentaire plus sûre et moins stigmatisante :

  • Opter pour des assiettes à rebord et des plateaux antidérapants, qui favorisent l’autonomie sans attirer l’attention sur la difficulté.
  • Utiliser des ustensiles conçus pour la préhension, sobres et ergonomiques, afin de soutenir sans pointer du doigt la dépendance.

La préparation en avance, le batchcooking, s’impose comme une solution efficace : cuisiner différentes bouchées, les répartir sur la semaine, permet d’assurer des menus variés, équilibrés et adaptés à chacun, tout en allégeant la charge quotidienne.

Respecter les envies, varier les saveurs, inviter la personne à choisir ce qu’elle souhaite manger : ces gestes simples valorisent et encouragent. L’environnement aussi a son rôle : lumière douce, ambiance calme, présence discrète des aidants, tout contribue à rassurer et à limiter les troubles du comportement lors du repas.

Enfin, il ne faut pas négliger la santé bucco-dentaire. Un suivi dentaire régulier, des textures ajustées, des repas fractionnés tout au long de la journée : autant de leviers pour préserver le plaisir de manger et soutenir la santé des aînés, en EHPAD comme à domicile.

À chaque bouchée retrouvée, c’est un peu de dignité, d’appétit et de lien social qui revient à la table. La lutte contre la dénutrition prend alors une autre dimension : celle qui place la personne, et non le protocole, au centre du repas.